1 - Le choix dans la fiscalité applicable
Lorsque des particuliers louent un bien immobilier, les loyers générés sont taxés directement pour chaque associé à l'impôt sur le revenu (ci-après « IR ») dans la catégorie des revenus fonciers.
Notons que les intérêts d'emprunt, les frais de constitution, de garantie, d'entretien et de réparation, les dépenses d'amélioration, les frais de gestion, la taxe foncière et les primes d'assurances sont déductibles de ces revenus.
Mais tout l'avantage de détenir un patrimoine immobilier via une société civile réside dans l'option fiscale quâelle ouvre : à tout moment (et pour la durée entière de lâexercice fiscal), les associés peuvent faire le choix dâopter pour l'impôt sur les sociétés et abandonner le système de l'IR.
Dans ce cas, la société peut déduire les frais d'acquisition du bien et surtout amortir l'immeuble selon une durée plus ou moins longue (généralement comprise entre 30 et 50 ans) : cet amortissement va permettre à la société de déduire chaque année de ses bénéfices une partie de l'immeuble ce qui aura pour conséquence d'écraser la base imposable. De plus, les bénéfices sont imposés au taux de 15 % sur les 38.120 premiers euros de bénéfices, puis au-delà à un taux de 28% (qui devrait atteindre 25% en 2022 selon la loi de finances pour 2018). Pendant que la société reste propriétaire de l'immeuble, le régime de taxation est donc plus favorable qu'à l'impôt sur le revenu.
Cependant, il convient de balancer ces avantages : en effet, la distribution des bénéfices donnera lieu à l'imposition de la « flat tax » instaurée par la loi de finance pour 2018 au taux de 30% (12,8% dâimpôt sur le revenu augmenté des prélèvements sociaux de 17,2%). Les associés pourraient aussi continuer à bénéficier de lâancien barème de l'impôt sur le revenu.
Seconde précision, le régime de sortie de l'immeuble de la société est moins avantageux quâen cas de taxation à l'impôt sur le revenu. En cas de vente du bien immobilier, la plus-value est déterminée à partir du prix d'acquisition, après réintégration des amortissements et sans abattement pour la durée de détention. Elle est ensuite imposée comme un bénéfice au taux de 15% puis de 28% (25% à partir de 2022).
Il conviendra dès lors de réaliser des simulations avec un professionnel afin de calculer l'intérêt ou non d'opter pour l'impôt sur les sociétés, choix qui est irrévocable !
Une dernière précision qui peut se révéler redoutable : la location meublée par une société civile immobilière entraîne immédiatement son imposition à l'impôt sur les sociétés car l'administration fiscale considère lâactivité meublée comme une activité fiscalement commerciale incompatible avec l'impôt sur le revenu.
2 - Transmettre à ses enfants tout en conservant les pleins pouvoirs sur les biens immobiliers
Comment concilier la transmission de son patrimoine mobilier ou immobilier afin de réduire l'impact des droits de succession tout en conservant les pleins pouvoirs sur les immeubles transmis ?
La société civile peut être la solution.
Dès lors que la société civile est propriétaire du parc immobilier (ou d'autres types de biens comme des contrats de capitalisations, des portefeuilles-titres etc...), il pourrait être judicieux de donner la nue-propriété des titres de la société à ses héritiers. Les parents resteraient usufruitiers des titres et seraient désignés comme cogérants. Les statuts de la société prévoyaient que l'ensemble des droits de vote seraient octroyés à l'usufruitier. Toutes les décisions seraient ainsi réservées aux parents telles que celles d'engager des travaux, d'entretenir les biens, de les mettre en location, de continuer à en percevoir les loyers et surtout de pouvoir les vendre sans avoir à obtenir une quelconque autorisation des enfants !
Par ailleurs, la transmission des titres de la société permettrait une transmission dite au fil de l'eau : chaque parent peut aujourd'hui donner jusquâà 100.000,00 ⬠à chaque enfant tous les 15 ans. Par conséquent, la transmission d'une partie seulement des titres sociaux pourrait être envisagée afin de ne pas dépasser cette somme et en conséquence ne pas avoir à régler de droits de mutation.
Rappelons enfin que si la détention de sa résidence principale dans une société civile ne permet pas de bénéficier de l'abattement de 30 % vis-à -vis du nouvel impôt sur la fortune immobilière (IFI), la valorisation des titres de la société peut toujours bénéficier dâune décote de 10% à 15% de sa valeur pour illiquidité.
3 - Organiser l'usage commun d'un bien
Dès lors que des amis ou des héritiers souhaitent organiser un patrimoine acquis ou transmis comme une maison de vacances ou de famille, la société civile pourrait apporter beaucoup plus de souplesse dans l'organisation des pouvoirs que ne l'aurait permis une indivision classique.
L'indivision est la situation de droit qui sâimpose à toutes les personnes détenant un bien ensemble. Mais l'indivision souffre de deux maux :
L'instabilité : à tout moment, un des indivisaires membres de l'indivision pourra demander le partage et sortir de l'indivision en réclamant une indemnisation aux autres indivisaires (article 815 du Code civil : "nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision") : à moins de racheter la part de celui qui souhaite se retirer, la seule solution reste la vente dudit bien.
La lourdeur de gestion : tout acte sortant de la gestion et de l'entretien courant du bien (la vente, l'hypothèque, la location commerciale, les grosses réparations sur l'immeuble etc...) requiert l'unanimité des indivisaires. Pour les autres décisions d'administration, c'est la règle des 2/3 des indivisaires qui l'emporte (article 815-3 du Code civil).
Certes, il est possible de signer une convention d'indivision renouvelable tous les cinq ans qui apportera plus de souplesse dans la gestion notamment avec la nomination d'un gérant de l'indivision qui pourra décider de tout ce qui a trait à l'entretien de l'immeuble, les travaux, la mise en location. Mais cette convention d'indivision nâest pas souhaitable sur le long terme. Au contraire, la société civile permettra de prévoir n'importe quelle majorité et de faire du sur-mesure pour telle ou telle décision (location, vente etc...). Pareillement, la sortie des associés en société sera aménagée grâce à une clause d'agrément. Cerise sur le gâteau, il pourrait même être prévu des semaines d'occupation du bien entre tous les associés. Pour la réalisation de tels objectifs, la rédaction des statuts sera primordiale et nous vous conseillons d'en confier la rédaction à un notaire.
4 - Assurer au concubin survivant la conservation de la résidence principale en cas de décès de l'autre
Dans le cas d'un décès d'une personne vivant en couple ni mariée ni pacsée, le concubin survivant n'est pas héritier du défunt et n'a théoriquement droit à rien dans la succession.
Dès lors, si un bien immobilier avait été acquis 50/50 par deux concubins, et qu'il existe des enfants communs ou non au couple, le décès du premier parent entraine immédiatement l'ouverture dâune indivision entre le survivant et les enfants. Toutes les décisions sur le bien nécessiteront dès lors l'avis des enfants s'ils sont majeurs et le recours au juge de tutelles en cas de minorité.
La solution consiste donc à faire l'acquisition du bien via une société civile dont les parts sociales auront été démembrées entre les concubins.
Ce mécanisme juridique consiste à s'échanger respectivement l'usufruit des parts de chacun. Le premier concubin possède la moitié des parts numérotées de 1 à 50 de la SCI. Il en échange l'usufruit contre celui de la seconde moitié des parts numérotées de 51 à 100 appartenant au second concubin. Il est donc nu-propriétaire des parts 1 à 50 et usufruitier des parts 51 à 100.  Et inversement pour le second concubin.
Quand survient le décès du premier, le survivant retrouve la pleine propriété des parts dont il avait cédé l'usufruit, sans droits de succession à payer. Et sur l'autre moitié, il conserve l'usufruit. Il dispose ainsi du droit de jouissance sur la totalité du logement pour le reste de sa vie. Seule lui échappe la nue-propriété des parts du défunt. Si la nue-propriété des parts du défunt est transmise à ses héritiers, cela ne leur donne pas le pouvoir d'imposer la vente du logement : mieux, les statuts auront été aménagés de manière à ce que l'ensemble des pouvoirs soient dévolus aux usufruitiers. Les enfants, seuls titulaires de la nue-propriété n'auront donc aucun pouvoir sur les biens constituant la société.
5 - Protéger ses biens des créanciers
Pour l'entrepreneur individuel, l'article L. 526-1 du Code de commerce prévoit l'insaisissabilité automatique de sa résidence principale. Seulement, cette protection à des limites :
- Elle n'existe pas pour le professionnel exerçant via une société commerciale (SARL, SA, SCP, etc...) ;
- la protection ne concerne que la résidence principale ;
- la protection tombera en cas de passage de l'exploitation individuelle en société.
La société civile peut apporter une protection plus pérenne au chef d'entreprise peu important l'activité exercée (commerce, libérale, industriel etc...) et la forme d'exercice. D'abord les biens personnels pourraient être mis à l'abris dans une première société. Ensuite, les biens d'exploitations seront acquis via une société civile dont les titres seront détenus par le chef d'entreprise et son conjoint/partenaire/concubin.
En cas de difficulté financière, les créanciers n'auront que la possibilité de saisir les titres sociaux et non les immeubles : l'intérêt de créancier est réduit et la procédure sera plus longue puisqu'il faudra composer avec les clauses d'agrément.
N'hésitez pas à venir nous rendre visite ou à nous appeler à l'étude carnot associés à Caen pour plus de détails et pour un conseil personnalisé.